Développez votre stratégie environnementale.
1 février 2021 5 min
Juliette Lerch

Spécialiste durabilité
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La Suisse participe à la lutte contre la dégradation de l’environnement. Elle s’engage à réduire les impacts environnementaux, la consommation d’énergie, ainsi qu’à limiter le réchauffement de la planète à moins de 2°C, en visant la neutralité climatique d’ici à 2050. Pour atteindre ces objectifs, tous les acteurs de la société doivent s’engager aux côtés de la Confédération. Cantons, communes, entreprises, particuliers : nous sommes tous acteurs de la transition.

L’écobilan, la première étape de l’engagement

La première étape d’une démarche de réduction de son empreinte environnementale consiste souvent à réaliser un écobilan afin de connaître ses impacts environnementaux réels. L’écobilan peut se pencher sur la consommation de ressources ou sur les atteintes environnementales : consommation énergétique, consommation en eau, émissions de gaz à effet de serre, etc. Certains écobilans compilent même tous ces impacts et les transforment en « unités de charge écologique » (méthode qui prend en compte diverses atteintes à l’environnement ainsi que la consommation en ressources, pour les agréger en un seul indicateur commun).

Un écobilan peut être réalisé autant pour un produit que pour un service ou un système entier. Dans le cas d’un produit, l’écobilan prend en compte tout le cycle de vie du produit en question, de l’extraction des ressources jusqu’à l’élimination, en passant par la fabrication, le transport et l’utilisation. Il permet d’obtenir des données sur les ressources consommées et sur les substances polluantes émises dans l’environnement tout au long du cycle de vie du produit.

Réaliser un écobilan permet donc d’analyser la consommation en ressources (eau, bois, pétrole, etc.) ainsi que de chiffrer les atteintes à l’environnement (émissions de substances polluantes, émissions de gaz à effet de serre, etc.). Cette première étape permet dans un second temps de mettre en place des mesures efficaces pour limiter ces impacts de manière ciblée et conséquente. Une commune qui remarquera, par exemple, que 30% de son bilan sont dus à la mobilité, pourra focaliser ses efforts sur le développement de mesures renforçant la mobilité douce et les transports publics.

Par la suite, la mise à jour de l’écobilan permet un suivi de l’évolution de la situation et des atteintes des éventuels objectifs fixés.

Une tâche parfois complexe

Lors de la réalisation d’un écobilan, il s’agit d’abord de définir les limites du système que l’on souhaite évaluer. Par exemple, lorsqu’une ville souhaite réaliser son bilan carbone, elle peut prendre en compte les émissions réalisées sur son territoire communal (y compris par les personnes qui n’y résident pas mais qui y transitent en voiture), ou alors prendre en compte les émissions imputables à ses habitants (tant sur son territoire qu’à l’extérieur de son territoire, ce qui implique par exemple de prendre en compte les émissions générées par les vols en avion des habitants de la ville).

Il s’agit ensuite d’obtenir les informations nécessaires à la réalisation de l’écobilan. Cette tâche peut parfois s’avérer compliquée, notamment lorsqu’un produit est composé de centaines d’éléments provenant des quatre coins du globe (pour une voiture, par exemple). Il s’avère alors difficile de récolter les données nécessaires pour l’ensemble des composants : des incertitudes subsistent concernant leurs impacts environnementaux. Au vu de la complexité de l’exercice et afin de garantir un résultat de qualité, il est important de se tourner vers des professionnels pour réaliser un écobilan.

L’écobilan des Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG)

Soucieux de limiter les effets de leurs activités sur l’environnement et désirant mettre en place des actions efficaces en matière de développement durable et de transition énergétique, les HUG ont réalisé un écobilan en 2008 déjà. Pionniers en la matière, il s’agit du premier hôpital européen à réaliser un tel bilan.

L’écobilan a mis en avant l’impact des HUG en termes de consommation d’énergie primaire et d’émission de gaz à effet de serre. L’étude a permis de mettre en évidence trois gros consommateurs : les matériaux et produits entrants (médicaments, textiles, etc.), la consommation énergétique des bâtiments et les transports (déplacements pendulaires des employés et déplacements des visiteurs et patients). Les résultats de l’écobilan ont permis d’orienter les HUG dans le développement de mesures : ils ont ainsi par exemple renforcé la mobilité douce et agi sur les économies d’énergie.

Bilan climatique et énergétique de la Ville de Bienne

Dans le cadre du volet « protection du climat » de sa stratégie climatique, la Ville de Bienne a réalisé en 2020 son bilan climatique et énergétique. En matière de périmètre d’étude, la Ville de Bienne a choisi de prendre en compte la consommation énergétique et les émissions de gaz à effet de serre réalisés sur son territoire communal (principe de territorialité). Ces bilans ont permis de mettre en avant plusieurs éléments intéressants. D’un point de vue énergétique, la consommation finale biennoise est dominée par les carburants (essence, diesel), la consommation d’électricité et les combustibles (mazout, gaz). D’un point de vue climatique, les gaz à effet de serre sont principalement émis par les entreprises, le secteur des transports et les ménages. La Ville rend cependant attentif au fait que si l’on prend en compte les émissions grises (c.-à-d. les émissions générées à l’étranger lors de la production de biens et services ensuite importés), alors le bilan carbone augmente fortement, puisque 60% des émissions totales proviennent de biens importés. C’est ainsi que la Ville souhaite prendre également des mesures pour limiter ces émissions grises, en agissant par exemple sur la consommation.

L’écobilan des aliments

Pour calculer l’empreinte écologique des aliments, il est nécessaire de prendre en compte de nombreux facteurs tels que les émissions de CO2, de nitrate ou encore de produits phytosanitaires, ainsi que l’utilisation en eau, en terres et en énergie. Tous ces paramètres sont traduits en unité de charge écologique (UCE), ce qui permet de pouvoir comparer les aliments selon leur impact environnemental global. La Société Suisse de nutrition a réalisé cet exercice. C’est ainsi que (sans surprise) la viande pointe au sommet du classement avec 5'928 UCE pour 110 g de bœuf. Pour la même quantité de porc, on décompte 2'180 UCE et 1'601 UCE pour le poulet. L’écobilan permet également de comparer les fruits et légumes en fonction de leur provenance et mode de transport. On compte 181 UCE pour un légume ou fruit suisse ayant poussé en plein air, 351 pour un même légume ou fruit ayant poussé sous serre (chauffée) en Suisse. Quant aux fruits et légumes importés d’autres pays européens, on compte 257 UCE si l’aliment est transporté par la route, 273 UCE pour le transport par bateau et 1'392 UCE pour le transport par avion. L’écobilan montre également des résultats interpellant en ce qui concerne les boissons : un café équivaut à 575 UCE, contre 51 UCE pour un thé noir et 0,3 UCE pour un verre d’eau du robinet. Ces écobilans permettent d’avoir des informations claires sur l’impact écologique des aliments, et de faire ainsi des choix de consommation conscients.

Bilan écologique des aliments. Source : société suisse de nutrition

Un écobilan, toujours nécessaire ?

Comme le montrent ces exemples, la réalisation d’un écobilan est souvent la première étape avant la réalisation d’une stratégie environnementale ambitieuse. Un tel bilan permet de bien connaître l’état de la situation, et de s’engager de manière optimale avec des mesures efficaces et ciblées. Une telle démarche a toutefois un coût, parfois conséquent, surtout lorsque l’on souhaite des données très précises. Il est donc important de se poser la question de la pertinence d’une telle analyse.

Dans certains cas, lorsque les sources principales des atteintes environnementales sont connues ou semblent évidentes, il paraît plus efficient d’investir directement dans des mesures concrètes permettant de limiter rapidement ses atteintes, plutôt que de calculer celles-ci de manière très précise. Il est ainsi conseillé de faire une pesée des intérêts pour définir le niveau de détails utile d’un écobilan, le but étant que ses résultats fournissent les indications suffisantes pour agir au bon endroit.


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